Alors que le tissu social camerounais évolue à un rythme soutenu, les Églises – toutes confessions confondues – se retrouvent face à un enjeu de taille : reconquérir une jeunesse en quête de repères, souvent tiraillée entre traditions spirituelles, culture numérique et urgences socio-économiques.
Les chiffres sont parlants : selon plusieurs enquêtes récentes, moins de 35 % des jeunes âgés de 15 à 30 ans participent régulièrement aux activités religieuses classiques, notamment les cultes, les retraites ou les groupes de prière. En cause : une impression de décalage entre les messages prêchés et les réalités concrètes vécues par cette tranche de la population. Beaucoup dénoncent un langage jugé « vieilli », une absence d’espace d’expression authentique et une insuffisance d’initiatives pastorales intégrant les problématiques actuelles telles que le chômage, les addictions ou les réseaux sociaux.
Pourtant, de nombreuses Églises tentent de s’adapter. À Douala, Yaoundé ou Bafoussam, des paroisses intègrent aujourd’hui des groupes de parole mixtes, des ateliers de développement personnel ou même des formations numériques pour favoriser l’ancrage spirituel dans la vie active. Certains leaders charismatiques misent sur TikTok, YouTube ou Instagram pour partager des messages inspirants, prier en direct ou répondre aux questions existentielles posées par les jeunes.
Mais ces efforts restent encore trop dispersés. Il manque une stratégie coordonnée, interconfessionnelle, pour former des pasteurs, prêtres, imams ou responsables de jeunesse capables de parler le langage de cette nouvelle génération sans trahir l’essence du message religieux. L’Église doit aussi s’ouvrir davantage à la co-construction : écouter les jeunes avant de les exhorter, comprendre leurs rêves avant de les orienter.
Dans un pays où les jeunes représentent plus de 60 % de la population, l’avenir de la foi passe inexorablement par une meilleure inclusion de cette génération, ses doutes, ses aspirations et sa créativité. Pour cela, l’Église camerounaise est appelée à réinventer son rôle social et spirituel, sans perdre son âme.
