L’avènement du numérique n’a pas épargné les espaces de foi. Au Cameroun comme ailleurs, les Églises, mosquées et autres lieux de culte se réinventent progressivement face à une génération ultra-connectée. Une transition parfois délicate, mais nécessaire pour maintenir le lien spirituel avec des fidèles de plus en plus mobiles, exigeants et technophiles.
Tout a véritablement basculé avec la pandémie de COVID‑19. Interdictions de rassemblements, fermeture des lieux de culte, distanciation… Les responsables religieux ont dû trouver en urgence des alternatives numériques pour maintenir le lien avec leurs communautés. C’est ainsi que sont nées les messes sur Facebook, les cultes en direct sur YouTube ou les cercles de prière via WhatsApp ou Zoom. Une révolution silencieuse qui perdure bien après la levée des restrictions.
Aujourd’hui, plusieurs pasteurs et imams camerounais disposent de chaînes en ligne, organisent des séances de prières interactives, animent des lives ou encore proposent des podcasts spirituels. Des plateformes comme Telegram sont même utilisées pour partager des méditations quotidiennes, organiser des quêtes virtuelles ou répondre aux préoccupations spirituelles des fidèles.
Mais cette mutation pose aussi des questions profondes. Peut-on véritablement vivre sa foi derrière un écran ? Le sacré peut-il être transmis via une connexion Internet ? Pour beaucoup, rien ne remplace la chaleur d’une communauté rassemblée physiquement, le silence d’une chapelle ou l’appel à la prière au minaret. D’autres pointent le risque de « foi superficielle » ou de dérives sectaires facilitées par l’anonymat et l’absence de contrôle sur certaines pages religieuses.
Du côté des institutions, les avis sont partagés. Si certains responsables religieux saluent l’outil numérique comme une « extension de l’évangélisation », d’autres craignent une déstructuration des pratiques traditionnelles. Pourtant, le numérique n’est pas un ennemi de la foi, mais plutôt un levier d’adaptation. Il peut rapprocher ceux qui vivent loin, qui sont malades, isolés, ou tout simplement curieux de découvrir un message de paix dans un monde troublé.
En définitive, l’Église connectée ne remplace pas l’Église physique, mais l’accompagne dans sa mission d’aujourd’hui. Il s’agit non pas d’opposer le virtuel au spirituel, mais de les harmoniser avec sagesse, éthique et discernement.
