Reconstruire un pays en ruines
Le Sénégal est sur le fil du rasoir. Il peut basculer à tout moment du fait d’un président qui ne veut pas lâcher prise alors que son dernier mandat expire dans six mois. Les opposants radicaux sont persécutés, emprisonnés et parfois liquidés.
Dans moins d’une année, le Sénégal aura un nouveau président. En tout cas, c’est le vœu le plus ardent de millions de concitoyens. Ce changement désiré n’est pas une fin en soi. En effet, il nous faut obligatoirement ouvrir une nouvelle page de notre histoire qui, nous l’espérons, sera beaucoup plus reluisante que les onze dernières années que nous venons de subir.
Reste que ce nouveau départ ne sera pas de tout repos pour le prochain locataire du palais, tant le pays est en ruines. Nous ne faisons nullement allusion à des constructions délabrées ou abandonnées car d’aucuns m’opposeront les immeubles qui poussent comme des champignons à Dakar, quelques kilomètres d’autoroute, des ponts, un BRT ou un TER d’à peine 40 km ; des infrastructures qui n’émerveillent plus personne, tant on en voit dans toutes les capitales africaines sans qu’on ne s’interroge – et de mon point de vue, c’est le plus important- sur leur caractère prioritaire ou non, leur utilité, leur coût et leur mode de financement.
Les ruines que nous évoquons sont d’ordre moral, sociétal, intellectuel et juridique. Il est donc certain que le prochain président aura du pain sur la planche et, au regard des attentes des Sénégalais, ne bénéficiera pas d’un long état de grâce. Pourtant, il ne pourra rien construire de durable sans commencer par traiter les ruines, décaper, récurer, assainir, séparer le bon grain de l’ivraie dans tous les compartiments de notre pays, de notre société, de notre administration, centrale et territoriale. Bref, il lui faudra rebâtir les fondations.