Sénégal : Silence, les forces de l’ordre tuent des manifestants !

Depuis samedi 3 février, jour de l’annonce, par Macky Sall, du report de l’élection présidentielle initialement prévue le 24 du même mois, 3 jeunes sénégalais sont tombés sous les balles des policiers et gendarmes, des dizaines d’autres sont blessés, sans compter les centaines d’arrestations. Le contexte politique a voulu que les projecteurs soient braqués sur le Sénégal, et nombreux sont les organisations internationales qui se sont émues et dénoncé « l’usage disproportionnée de la force ». Formule creuse balancée à chaque fois que de tels faits graves se produisent.

Pourtant, ce n’est pas une nouveauté au Sénégal. Entre mars 2021 et décembre 2023, près d’une centaine de jeunes, essentiellement des garçons âgés de moins de 30 ans ont été tués par armes à feu lors de manifestations liées aux multiples procédures judiciaires engagées contre Ousmane Sonko, leader du parti Pastef et adversaire politique irréductible de Sall. Des centaines de blessés ont été comptabilisés, dont des handicapés à vie. D’autres, plus chanceux ont été arrêtés et jetés en prison sans aucun procès. Beaucoup de ces victimes étaient juste présentes au mauvais endroit, au mauvais moment.

Silence coupable de la communauté internationale

L’opinion publique internationale s’étaient peu intéressée à ces évènements comme si l’actuel régime sénégalais bénéficiait d’une mansuétude que l’on n’accorderait à aucun autre pays. A tout le moins, c’est ce que nous avons observé. Ce silence a été certainement interprété comme de l’impunité, ce qui a peut-être galvanisé les forces de l’ordre.

Cette situation est d’une extrême gravité. Jamais dans l’histoire du Sénégal, nous n’avons vu une telle hargne à vouloir casser du manifestant, une telle atrocité. En témoignent les centaines de vidéos diffusées sur les réseaux sociaux.

On ne doit pas mourir pour avoir manifesté, un droit garanti par la constitution de tout pays organisé. Ces crimes ne doivent pas rester impunis. Des enquêtes ont chaque fois été annoncées mais jamais lancées. Paradoxalement, la presse sénégalaise évoque un projet de loi d’amnistie porté par le régime actuel pour se sortir du guêpier dans lequel il s’est empêtré. Nous n’en voulons pas si l’intention est d’effacer des crimes de sang commis dans le cadre des manifestations politiques.

Le prochain président du Sénégal doit exiger des investigations sérieuses, traquer les fautifs sur toute la chaine de commandement et les sanctionner à la hauteur des faits incriminés pour, au moins, permettre aux parents, frères, sœurs et amis de faire leur deuil.

L’ONU et l’UA doivent assumer leurs responsabilités

Il revient également aux Nations Unies et à l’Union Africaine de prendre leurs responsabilités. A ce titre, tout nouveau recrutement de policiers et gendarmes sénégalais, quel que soit le grade, pour des missions de paix dans le monde doit être gelé jusqu’à ce que chaque fait délictueux soit élucidé. Ce n’est pas une demande, mais une exigence. Pourquoi ? Parce que des centaines d’agents, au moins 6000, ont été recrutés et intégrés à la gendarmerie et à la police durant ces trois dernières années, après une formation de 45 jours. Personne ne sait sur quelle base a été effectuée cette incorporation massive. Pour le régime, la finalité était de se donner les moyens pour mater toute voix dissonante.

Nous ne doutons pas de l’intégrité et de la compétence de tous les policiers et gendarmes. Seulement, nous estimons qu’il est impératif de séparer le bon grain de l’ivraie pour que demain de tels faits ne se reproduisent.

A.D.N