L’Afrique minée par les flux financiers illicites
Burkina Faso, République Démocratique du Congo, Mali, Mozambique, Nigéria, Sénégal, Afrique du Sud, Soudan du Sud, Tanzanie, Kenya et Namibie sont les pays africains figurant sur la Liste grise du Groupe d’Action Financière (GAFI) rendue publique à l’issue de sa réunion des 22 et 23 février 2024. Les deux derniers pays cités viennent d’y être intégrés, tandis que l’Ouganda en est extirpé après avoir mené les réformes nécessaires.
Cette liste grise comprend les pays qui font l’objet d’une surveillance accrue, et se sont engagés à résoudre les lacunes stratégiques de leur politique en matière de lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme (LCB-FT). Plus clairement, ce sont ceux qui ne respectent pas encore les normes internationales en matière de contrôle des flux financiers internationaux. Ceux où les délinquants financiers peuvent aisément sortir où cacher leurs actifs tirés de la corruption, du vol de fonds publics ou d’autres activités illicites telles que le trafic de drogue, le trafic de migrants et l’exploitation frauduleuses de ressources minières et forestières.
Le GAFI n’applique pas de sanctions officielles aux pays inscrits sur sa liste grise. Il n’en demeure pas moins que le fait d’y figurer entraîne des effets négatifs sur l’économie et la réputation. Autrement dit, ces pays peuvent faire l’objet de sanctions économiques de la part d’institutions telles que le FMI et la Banque mondiale et subir des effets négatifs sur leur commerce.
Le nombre significatif d’états figurant sur la liste est un indicateur pertinent attestant que l’Afrique constitue un des maillons faibles dans la lutte contre la criminalité financière internationale. Certains pays sont devenus une plaque tournante du trafic international de drogue ; dans d’autres, l’immobilier connait une explosion sans commune mesure avec l’activité réelle ; chaque année, la fuite des capitaux fait perdre près de 100 milliards de dollars au continent.
L’éclosion et l’essor des trous noirs de la finance résultent, entre autres, de la faiblesse de l’Administration (douanes, impôt, corps de contrôle de l’état…) ou de la déstabilisation due à des conflits armés. Mais il va sans dire que la mal gouvernance y est pour beaucoup. Au lieu de s’abriter derrière l’éternelle auto-victimisation, nos dirigeants devraient se résoudre à se remettre en question. L’Afrique a besoin de transparence et de rigueur afin de pouvoir prospérer.
A.D.N
N.B
Le Gafi est un organisme intergouvernemental qui supervise les tendances mondiales en matière de blanchiment d’argent et de financement du terrorisme. Il collabore avec ses États membres et les organisations régionales pour élaborer un cadre juridique, réglementaire et opérationnel permettant de lutter contre ces menaces.
Tout comme la liste noire (Iran, Corée du Nord et Birmanie), la liste grise a été créée en 2000 et fait l’objet d’une actualisation régulière.