Sénégal : la faillite d’un régime

Tout ça pour ça. C’est le constat désolant que l’on pourrait faire après que l’Etat du Sénégal s’est désisté de son pourvoi en cassation contre la décision du tribunal d’instance hors classe de Dakar de réinscrire Ousmane Sonko sur les listes électorales. Laquelle décision confirmait celle prise par le juge Sabassy Faye, en octobre 2023, à Ziguinchor.

Sa condamnation par contumace à deux ans de prison ferme dans l’affaire « Sweat Beauty » est donc définitivement anéantie. Et comme la loi d’amnistie votée au début du mois de février par l’Assemblée nationale englobe la condamnation à 6 mois avec sursis prononcée dans le dossier pour diffamation l’opposant au ministre du tourisme Mame Mbaye Niang, Sonko retrouve tous ses droits civiques et redevient électeur et éligible.

Le leader de Pastef remporte haut la main une bataille judiciaire et physique que lui avait déclarée le régime de Macky Sall, avec pour unique objectif de l’empêcher de participer à l’élection présidentielle finalement prévue le 24 mars 2024. Cet objectif est atteint, mais l’état le doit exclusivement à une administration aux ordres, qui a fait scandaleusement obstacle à son dépôt de candidature.

Toujours en prison – son élargissement ne saurait tarder-, Sonko a fait preuve d’une résilience hors pair, aidé en cela par une organisation politique qui a tenu bon contre vents et marées, et un pool d’avocats rompus à la tâche.

A ce jour, personne ne sait ce que demain sera fait dans le bras de fer qui oppose Sonko au régime actuel. Il est cependant certain que ce dernier a failli en voulant utiliser tous les moyens de l’Etat pour museler un opposant certes virulent, mais qui cherche à conquérir le pouvoir en toute légalité. Le Sénégal a chèrement payé trois années de folie marquées par près d’une centaine de morts, des centaines de blessés graves et de prisonniers qui ont eu pour seul tort de vouloir exercer leur droit à manifester pacifiquement. L’histoire retiendra que cette douloureuse épisode a eu lieu sous la présidence de Macky Sall. Triste sortie pour quelqu’un à qui la République a tout donné mais qui peut être désormais assimilé – en s’inspirant de la fable de La Fontaine- à « la grenouille qui se veut faire aussi grosse que le bœuf ».

A.D.N